Une étude de la DREES, publiée le 3 octobre, révèle une baisse alarmante du personnel dédié à l'accompagnement des personnes âgées en perte d’autonomie, bénéficiaires de l'APA à domicile ou résidants en établissement. Ce constat est d'autant plus préoccupant quand on projette que d'ici 2030, la France comptera plus de 20,6 millions de personnes âgées de 60 ans et plus, soit près de 2 millions de seniors supplémentaires de 75 ans et plus. La grande majorité d'entre eux nécessitera une assistance particulière liée à la perte d’autonomie. Face à cette situation, comment garantir que chaque senior, qu'il réside à domicile ou en établissement spécialisé, reçoive l'accompagnement humain nécessaire pour vivre dans de bonnes conditions ?
Accompagnement des seniors : la DREES dévoile les besoins en personnel à venir
La récente étude menée par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) et l’Institut des politiques publiques (IPP) dresse un état des lieux des besoins en personnel médico-social pour l’accompagnement des seniors en perte d’autonomie, qu’ils résident à domicile ou en établissement spécialisé.
En s’appuyant sur les données fournies par les conseils départementaux pour les bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) à domicile et sur les réponses issues de l'enquête menée auprès des EHPAD[3], l’étude a pour but d’évaluer le nombre d’aides à domicile, d’infirmiers, d’auxiliaires de vie et de soignants nécessaires pour répondre aux besoins grandissants des personnes âgées dans les années à venir.
Mauvaise nouvelle, le rapport de la DREES prévoit une pénurie de personnel…
Le maintien à domicile : une charge de travail en hausse
Plus la perte d'autonomie est importante, plus les besoins en accompagnement augmentent. Grâce à l’aide des professionnels à domicile, de nombreux seniors choisissent de rester chez eux malgré leur dépendance[5]. Actuellement, environ 786 000 seniors bénéficient de l'Allocation Personnalisée d'Autonomie (APA), une aide financière qui couvre les dépenses liées à la dépendance[5] (GIR 3 ou GIR 4), comme les tâches ménagères, l'aide à la toilette, la préparation des repas ou encore les déplacements.
Pour soutenir ces personnes, l’étude de la DREES révèle l'ampleur du travail nécessaire par les aides à domicile, soit 27 millions d'heures par mois. Ce calcul prend en compte :
- La durée moyenne de présence à domicile (environ 23 minutes par intervention), représentant 62 % du temps de travail réel.
- Les temps de trajet entre les différents bénéficiaires.
- Les pauses et périodes d’attente entre deux interventions.
Ces 27 millions d’heures correspondent à 179 400 équivalents temps plein (ETP), soit environ 0,2 ETP par senior bénéficiaire de l’APA, l’équivalent d’une personne travaillant à 20 % du temps plein pour chaque senior.
L'accompagnement en Ehpad : 7 professionnels pour 10 résidents
En ce qui concerne les personnes âgées avec un degré de perte d'autonomie importante (GIR 1 ou GIR 2), ils étaient 730 000 en 2019 à résider en établissements, dont 594 700 en Ehpad[3]. Un nombre qui va encore croître avec l'arrivée des baby boomers dans leurs années de retraite.
Ces établissements comptaient 507 900 salariés, dont 448 700 en EHPAD[3], soit un ratio de 0,7 équivalent temps plein (ETP) par résident, bien supérieur aux 0,2 ETP nécessaires pour un senior vivant à domicile.
Cette différence s’explique par les besoins plus importants des résidents en Ehpad[3], qui présentent souvent des limitations fonctionnelles sévères avec une assistance constante, non seulement pour les activités quotidiennes, mais aussi pour des soins médicaux plus complexes. Et ce même pour un niveau de dépendance[5] équivalent.
En effet, la majorité des missions d’intervention en EHPAD[3] concernent les soignants et professionnels assimilés (infirmiers, médecins, aides-soignants, accompagnants éducatifs), soit 60 % du personnel. Les 40 % restants se composent de personnel administratif, d’encadrement et de fonctions support, souvent peu en contact direct avec les résidents.
Ainsi, en 2019, le besoin réel en personnel pour l'hébergement des seniors en établissement, hors résidences autonomie, était estimé à 430 680 ETP.
Solutions et pistes pour répondre aux besoins des seniors d'ici 2050
Bien que l’étude exclut l'intervention des proches-aidants et aidants familiaux, en se concentrant uniquement sur les professionnels rémunérés… À domicile ou en établissement, ces derniers risquent de se retrouver en tension : surcharge de travail, suivi moins personnalisé des seniors par manque de temps et fatigue morale comme physique.
Dans le cadre des réflexions politiques sur le financement de la dépendance[5], plusieurs pistes ont été suggérées, notamment dans le rapport sénatorial du 25 septembre dernier sur le financement des établissements d’accueil pour personnes âgées.
Parmi ces propositions, une mesure controversée évoque l’instauration d'une nouvelle journée de travail non rémunérée, dont les revenus seraient alloués au financement des Ehpad[3].
Dans son étude, la DREES souligne d'autres solutions pour faire face à l'augmentation des besoins des seniors :
- Augmenter la capacité d’accueil : en 2050, 1,2 million de personnes demanderont un hébergement en établissement contre 730 000 aujourd'hui.
- Renforcer les effectifs : doubler le nombre de professionnels d'ici 2050 via de meilleures conditions salariales, une reconnaissance sociale et des parcours de formation adaptés et continus.
- Soutenir les soignants : améliorer les conditions de travail pour diminuer la pression sur le personnel et garantir leur bien-être.
- Intégrer les nouvelles technologies : utiliser la domotique et la télémédecine pour optimiser l'accompagnement à domicile en complément du lien humain.
Enfin, pour évaluer le nombre de professionnels nécessaires dans chaque région d'ici 2050, la DREES a développé le modèle LIVIA (lieu de vie et autonomie) : un modèle de projection qui recense le niveau de dépendance[5], la tranche d'âge, le sexe et le lieu de vie des personnes âgées. Il sera prochainement enrichi par les données issues de la présente étude ainsi que par des projections régionales, réalisées en partenariat avec l'Insee.
En 2019 et 2021, on dénombrait respectivement 0,7 équivalent temps plein (ETP) pour chaque résident en EHPAD[3] et 0,2 ETP pour un senior vivant à domicile. Cependant, la DREES et l'IPP alertent sur l'augmentation des besoins en personnel due au vieillissement de la population. Que les seniors résident à domicile ou en établissement, ils auront besoin d’un accompagnement humain adapté, tant en quantité qu’en qualité, pour garantir leur bien-être et leur dignité, quel que soit leur lieu de vie.
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[1] Aide à domicile
L’aide à domicile est un service qui accompagne les personnes chez elles en leur apportant une assistance pour les tâches de la vie courante, comme le ménage, les courses, ou…
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[2] AMP
L’AMP (Aide Médico-Psychologique) est un professionnel qui aide les personnes en difficulté, notamment dans les établissements spécialisés, en les soutenant dans leur vie quotidienne et en leur offrant un accompagnement…
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[3] EHPAD
Les EHPAD sont des établissements médicalisés qui accueillent des personnes âgées qui ont besoin de soins médicaux réguliers et d’une aide dans leur vie quotidienne.
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Le maintien à domicile permet aux personnes âgées ou dépendantes de vivre chez elles en recevant l’aide nécessaire pour rester autonomes et en sécurité.
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[5] Dépendance
La dépendance de la personne âgée désigne le besoin d’aide pour réaliser les tâches de la vie quotidienne en raison de problèmes physiques ou mentaux.
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[6] GIR
Le GIR (Groupe Iso-Ressources) est un outil qui sert à évaluer le niveau d’autonomie des personnes âgées, en les classant selon leur besoin d’aide pour les activités quotidiennes.
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