« Nous, professionnels de santé, disons haut et fort que l’aide médicale à mourir est un soin ». Par cette déclaration dans la tribune Le Monde, 500 médecins, soignants et psychologues réamorcent l'épineux sujet de la fin de vie[1] en France. Cette publication, en collaboration avec l'association pour le droit à mourir dans la dignité, relance le débat public sur le droit à l'euthanasie ou au suicide assisté dans un cadre légal et réglementé. 

Ce nouveau démêlé, qui fait suite à la convention collective organisée par Emmanuel Macron, est l'occasion de revenir sur l'accompagnement des patients en fin de vie en France et celles souhaitées par une partie de l'opinion.

1- L’euthanasie et suicide assisté sont au coeur du débat

Des changements réclamés dans la tribune Le Monde 

Alors qu'une loi autorisant une aide médicale à mourir existe depuis 20 ans en Belgique, le débat sur l'euthanasie et le suicide assisté en France continue de : 

  • Soulever des questions éthiques, juridiques et sociétales complexes.
  • Susciter des opinions divergentes autour de la définition plus ou moins objective de la vie. 

“Une dualité entre autonomie et solidarité”, soulignée le 6 février dernier dans la tribune Le Monde

Les arguments pour l'euthanasie 

Les partisans de la fin de vie assistée en phase terminale prônent : 

  • Le droit de disposer de sa propre fin de vie dans la dignité.
  • Le soulagement de la souffrance physique et morale des patients mourants.
  • L'économie de ressources médicales pour des patients dont les traitements ne prolongent que leur agonie.
  • La possibilité d'éviter la douleur de la famille et des proches en permettant une mort plus douce et apaisée.
  • La reconnaissance de l'autonomie et de la liberté individuelle des malades.

Les arguments contre l’euthanasie 

Les opposants à l’euthanasie et au suicide assisté, en bref à l'aide active à mourir clament en parallèle : 

  • La sanction de la vie humaine qui ne peut être interrompue de manière intentionnelle.
  • Le risque de dérives et d'abus dans l'application de l'euthanasie, notamment pour des patients non consentants ou vulnérables.
  • Le danger de voir cette pratique médicale devenir un acte banal ou routinier.
  • Le non-respect de la valeur éthique du serment d'Hippocrate qui interdit aux médecins de donner la mort délibérément.

2- Des dispositifs de fin de vie existent en France

Les lois aux sujets de la fin de vie et de l'euthanasie en France

Encore considérée comme un crime, la mise à mort délibérée d'un patient, dit l’euthanasie active est interdite par la loi française. Cependant, plusieurs dispositifs d'euthanasie passive légale permettent de soulager les souffrances des patients en phase avancée ou terminale d'une maladie incurable.

La loi Leonetti et Claeys-Leonetti

Si l'euthanasie et le suicide médicalement assisté sont condamnables, la loi Léonetti de 2005 et la loi Claeys-Leonetti de 2016 régissent les soins palliatifs[2] français en autorisant : 

  • Un droit à la sédation profonde et continue : cette technique consiste à administrer des médicaments pour endormir le patient en fin de vie de manière ininterrompue et l'empêcher de souffrir jusqu'à son départ. Cette pratique s'applique si la personne est en phase avancée ou terminale d'une maladie incurable et si elle présente des symptômes réfractaires aux traitements. Selon l'évolution naturelle du patient sédaté, le décès varie entre 48h et 8 jours. 
  • Le droit des patients majeurs à rédiger des directives anticipées. Dans ce document, le mourant exprime à l'avance ses souhaits de fin de vie comme un refus de tout acharnement thérapeutique pour une maladie grave et incurable ou un souhait de mourir à domicile. Des écrits que les médecins doivent respecter.
  • Le malade, à désigner une personne de confiance (proche ou professionnel) pour respecter ses dernières volontés. 

Ces dispositifs ne visent pas à provoquer la mort, mais à soulager des souffrances et à garantir un décès digne.

Les propositions de la convention citoyenne

Lors de la convention citoyenne sur la fin de vie lancée le 9 décembre 2022 par le chef d'État, plusieurs suggestions pour laisser les patients décider de leur mort dans des conditions de cadre légal assouplies, semblent avoir retenu l'attention : 

  • Permettre une « aide active à mourir » pour des personnes atteintes d'une maladie neurodégénérative, comme la maladie de Charcot, dont le pronostic vital serait engagé à moyen terme.
  • Renforcer l'accès aux soins palliatifs : il est primordial de développer ces unités de soins de santé pour garantir un accompagnement de qualité aux patients malades, via : 
  • Une meilleure formation des professionnels de santé.
  • Une meilleure prise en compte de la douleur des patients. 
  • Un renforcement des moyens alloués aux soins palliatifs (à ce jour, le CCNE recense vingt-et-un départements dépourvus d'unité de soins palliatifs*). Avec une priorité pour les soins palliatifs à domicile, où les besoins non satisfaits et les difficultés d’organisation sont les plus importants.
  • Mettre en place des directives anticipées contraignantes : cette proposition obligerait les professionnels de santé à appliquer et respecter les directives anticipées des patients. Actuellement, les directives anticipées sont facultatives et ne sont pas toujours suivies par les médecins.
souhait d'une fin de vie par suicide assisté

3- Oui, on peut mieux accompagner une personne en fin de vie

Accompagner le départ d'un proche peut être une expérience émotionnellement éprouvante, mais également riche en humanité et en significations si vous restez à l'écoute et présent afin de comprendre ce que la personne ressent et de respecter son souhait pour ses derniers instants. Il est aussi possible de : 

  • Proposer des soins palliatifs : cette prise en charge globale et personnalisée vise à soulager la douleur et les autres symptômes du patient, ainsi qu'à répondre à ses besoins psychologiques, sociaux et spirituels. Ces soins de santé sont dispensés par des équipes soignantes pluridisciplinaires composées de professionnels de santé à domicile, à l'hôpital ou en Ehpad[3].
  • Se faire aider par un professionnel de l'accompagnement au deuil, aussi appelé doula de fin de vie.

L'accompagnement de fin de vie peut varier en fonction des besoins et des souhaits de la personne. Il est donc important de rester attentif et sensible à ses désirs afin de lui offrir un suivi personnalisé et bienveillant.

Débat et loi sur la fin de vie: y aura-t-il des changements? 

Dans certains cas de figure, les lois de fin de vie actuellement en vigueur en France sont floues et incomplètes… Rendant le débat sur l'euthanasie et le suicide assisté complexe et controversé. Pour autant, accompagner des patients en fin de vie est considéré par une partie des Français comme un devoir essentiel de solidarité. 

À présent, l’attention sera portée sur le rapport de la Convention citoyenne sur la fin de vie, attendu d'ici la fin mars 2023. Présentée par la Première ministre Elisabeth Borne, cette nouvelle convention citoyenne pourrait permettre de répondre aux attentes concernant l'autonomie des patients et ouvrir le choix à une mort digne et apaisée.

Sources : 

LOI n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, Legifrance, avril 2005

Site de la CCNE

Proposition de loi n°3755 visant à affirmer le libre choix de la fin de vie et à assurer un accès universel aux soins palliatifs en France

Rapport d'activité 2022 "Fin de vie - Soins Pallialtifs"

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