Grand-âge: le deuxième tour des élections présidentielles aura lieu dans moins d’un mois, le 24 avril prochain. Selon sa sensibilité politique, chacun des douze candidats propose des solutions spécifiques pour les personnes âgées. Voici un bref décryptage des programmes des quatres premiers candidats (selon les sondages IFOP du 22 mars) destinés à l’électorat senior.
Une impulsion à retrouver pour la réforme du Grand âge
Le 1er octobre 2018, la Ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn lançait une concertation nationale :”grand âge et autonomie”. Ce projet proposait un vrai cadre pour la prise en charge des personnes âgées et la perte d’autonomie.
Le gouvernement avait décidé d’établir une véritable politique du vieillissement, face au défi démographique.
Une seule question pour cette concertation : comment prendre en charge les seniors?
Près de 2 millions de Français ont participé et écrit sur la plateforme du gouvernement. Les conclusions sont publiées six mois plus tard, en mars 2019, dans un rapport remis à la Ministre. L’impulsion était lancée et le projet s’annonçait particulièrement prometteur.
Malheureusement, trois ans après l’annonce, cette réforme “grand âge et autonomie” est purement abandonnée. La crise sanitaire, l’absence de réforme de la protection sociale n’ont pas permis l’adoption des lois.
Les résultats n’ont pas été à la hauteur des mesures annoncées : les différents partenaires sont déçus du résultat. Jean-Pierre Riso, président de la FNADEPA (Fédération nationale des associations de directeurs d’établissements et services pour personnes âgées) estime que
Des pans indispensables de réforme resteront malheureusement en suspens, comme celui de la gouvernance, de l’aide sociale[1], de la place des personnes âgées dans notre société
La prochaine course à la présidentielle permet de connaître les prochaines orientations des pouvoirs publics. Voici un éclairage sur les programmes des cinq candidats donnés favoris au premier tour des élections: Emmanuel Macron, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon, Éric Zemmour et Valérie Pécresse.
Emmanuel Macron: favoriser le maintien à domicile
Le Président de la République, Emmanuel Macron s’est déclaré candidat à un second mandat le 3 mars dernier. Il a présenté les grandes lignes de son programme deux semaines après lors d’une conférence de presse. Nous présentons ici ses orientations principales pour les seniors.
Le président-candidat a davantage insisté sur sa volonté de réformer le système de retraite que celui sur le grand âge. D’abord, il propose de repousser l’âge de la retraite à 65 ans.
Ensuite, il souhaite poursuivre les réformes entamées lors de son mandat. L’objectif principal est de favoriser le maintien à domicile[2] des personnes en perte d’autonomie. Le successeur de François Hollande veut aider les seniors à “vieillir chez eux”, changer le quotidien des personnes en perte d’autonomie.
Pour cela, le candidat entend revaloriser les salaires des aides à domicile et soutenir financièrement les aidants. Des actions concrètes : adaptation des logements au vieillissement et deux heures supplémentaires d’aides soignants.
Sur le principe de Ma Prime Rénov’, pour la rénovation thermique, Emmanuel Macron propose Ma Prime Adapt’. Cette prime pourrait correspondre à un remboursement de 40% à 90% des montants moyens des travaux, selon les revenus du foyer. Luc Broussy, spécialiste de l'économie des séniors, a proposé ce système pour aider les seniors à mieux vieillir.
Le candidat s’engage à ce que plus de 500 000 foyers bénéficient de cette prime dans les dix prochaines années.
M. Macron propose également plus d’heures à domicile pour les personnes âgées. Les modalités doivent être définies avec les collectivités et les personnels soignants concernés. Il souhaite enfin plus de 10 000 créations de postes dans les EHPAD.
Marine Le Pen : valoriser le statut des aidants
Marine Le Pen se présente comme candidate à l'élection présidentielle pour la troisième fois.
Elle propose le départ à la retraite après quarante annuités. Un senior de 60 ans peut donc partir à la retraite à 60 ans s’il a commencé à cotiser à 20 ans.
L’ancienne présidente du Rassemblement national oriente son programme sur l’aide des proches des personnes âgées. Sa proposition : deux mesures clés pour soutenir les proches aidants.
- Le dispositif actuel de congé de proche aidant est limité à trois mois. Marine Le Pen entend étendre sa durée à un an, dans la carrière de la personne concernée. Le congé sera également rémunéré d’après les revenus de l’aidant, et non plus un traitement fixe.
- Selon un principe identique, un proche aidant pourra bénéficier d’une indemnité de domicile. Il pourra recevoir un traitement s’il choisit de vivre pendant son congé avec la personne en perte d’autonomie.
Pour la candidate d’extrême-droite, soutenir les proches des seniors évitera des dépenses auprès des organismes sociaux et des personnels soignants. Les proches aidants remplacent ainsi les auxiliaires de vie et les aides-soignants à domicile.
Marine Le Pen évoque aussi la gestion des traitements en EHPAD[3], l’insuffisance des soins médicaux. La candidate veut imposer un médecin coordonateur pour chaque maison de retraite. De même, une infirmière doit être présente 24 heures sur 24 dans l’établissement.
Jean-Luc Mélenchon: la création d’un service public de la dépendance
Président du mouvement de la France Insoumise Jean-Luc Mélenchon se présente comme candidat pour la troisième fois.
Son programme reprend la plupart de ses propositions de 2017. Par exemple, il demande le départ en retraite à 60 ans à taux plein après 40 années de cotisation. Ce statut avait déjà été l’une de ses mesures phares lors de sa précédente campagne. Le candidat donne une place importante à la santé et la protection sociale.
Pour cette protection sociale, Jean-Luc Mélenchon propose d’élaborer un véritable service public de la dépendance[4]. Par exemple, ce service garantira l’ouverture d’EHPAD publics à moins de 30 minutes de chaque Français. Ces maisons de retraite auront des tarifs plafonnés et encadrés. Les établissements disposeront de plus de 10.000 places supplémentaires d’ici 5 ans selon ses prévisions.
Pour ce service public, plus de deux cent mille personnes seront embauchées et formées aux soins des seniors.
Tout comme ses adversaires, le président de la France Insoumise souhaite favoriser le maintien à domicile. Les modalités sont pourtant encore à définir.
Éric Zemmour : lutter contre l’isolement des personnes âgées
Le président de Reconquête est le candidat surprise de cette dernière année.
Pour sa première campagne électorale, il se démarque assez de ses proches familles politiques, menées par Marine Le Pen et Nicolas Dupont-Aignan.
Éric Zemmour propose une prime jusqu’à 600€ par an pour les “petites” retraites et une revalorisation des traitements pour les personnes âgées isolées.
Isolement est bien le mot clé de son programme sur le grand âge.
Cela signifie construire 400.000 nouvelles places en EHPAD, favoriser les relations intergénérationnelles (et installer des structures liées à la petite enfance près des maisons de retraite)...
Le candidat met en avant le maintien à domicile des seniors :
- création simplifiée des sociétés d’aides à domicile
- développement des réseaux de vigilance de proximité
- valorisation des prises en charge par les aidants. De même, il propose une prime annuelle et une revalorisation des tarifs du personnel soignant.
Ces mesures visent avant tout à accompagner, encadrer au maximum les aînés et empêcher la maltraitance. La perte d’autonomie ne peut être selon le candidat la perte du lien social.
Valérie Pécresse: renforcer le maintien à domicile des personnes âgées
La représentante du mouvement Les Républicains présente sa candidature pour la première fois. Dans ce cadre, Valérie Pécresse a rédigé un “plan d’urgence pour la santé”.
Sa politique du vieillissement des aînés est la plus approfondie des candidats.
Dès son élection, elle souhaite reprendre le régime des retraites : augmentation de l’âge légal de la retraite à 65 ans dès 2030. Elle souhaite aussi garantir un montant minimal de retraite pour tous les cotisants : ce versement serait à la hauteur du SMIC.
Ses propositions “grand âge” sont issues de son expérience de présidente du conseil régional d’Île-de-France. Par exemple, les présidents de région se verraient confier la présidence des Agences Régionales de Santé. Actuellement, ces établissements sont sous la responsabilité du Ministère de la Santé.
Valérie Pécresse reprend les orientations des autres principaux candidats. Pour elle, le maintien à domicile des personnes âgées s’impose. Dans ce cadre, elle propose plusieurs mesures :
- Réduction des taxes sur les salariés à domicile. Pour cela, le crédit d’impôt[5] des services à la personne sera doublé (seul 50% d’un emploi à temps plein sera pris en charge).
- Créer un statut pour les proches aidants des seniors. Ce “nouveau” personnel soignant aura un référentiel obligatoire pour les bonnes pratiques professionnelles.
La candidate des Républicains évoque aussi la personne âgée en EHPAD. La famille sera plus associée au fonctionnement de l’établissement (modalités encore à définir). Valérie Pécresse met l’accent sur la préventions des maltraitances : poursuites judiciaires des exploitants. Elle voudrait enfin encadrer la gestion des finances des grands groupes.
Tous sont POUR la valorisation du minimum de pension
Tous les candidats s’accordent pour reconnaître une réforme indispensable. Le montant des retraites se montre dérisoire avec la baisse du pouvoir d’achat.
Marine Le Pen propose 1.000 euros. Les autres candidats se montrent plus généreux entre Emmanuel Macron pour un montant de 1.100 euros voire un montant de SMIC net pour ses deux autres homologues, Valérie Pécresse et Jean-Luc Mélenchon.
Défi du vieillissement: ces programmes sont-ils assez ambitieux?
La plupart des acteurs du secteur senior (secteur associatif, personnel soignant…) critique la frilosité des candidats. Pas plus que lors des campagnes précédentes, le thème du vieillissement de la population française n’est exposé à sa juste mesure.
Les programmes énoncés ne sont pas assez forts face aux évolutions démographiques. Une remise en question s’impose concernant les dépenses publiques. Au-delà de ce sujet épineux, les pouvoirs publics, tout comme la société, doivent redéfinir la place des seniors qui sont plus que des consommateurs ou bénéficiaires d’aides financières.
Après plus de vingt ans de silence, de report, il est temps que le prochain président assure et assume de vraies réformes.
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[1] Aide Sociale
L’aide sociale est une assistance financière fournie par l’État pour aider les personnes en difficulté à couvrir des besoins essentiels, comme le logement ou les soins en établissement.
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Le maintien à domicile permet aux personnes âgées ou dépendantes de vivre chez elles en recevant l’aide nécessaire pour rester autonomes et en sécurité.
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[3] EHPAD
Les EHPAD sont des établissements médicalisés qui accueillent des personnes âgées qui ont besoin de soins médicaux réguliers et d’une aide dans leur vie quotidienne.
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[4] Dépendance
La dépendance de la personne âgée désigne le besoin d’aide pour réaliser les tâches de la vie quotidienne en raison de problèmes physiques ou mentaux.
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[5] Impôt
L’impôt est une somme d’argent que les citoyens et les entreprises paient régulièrement au gouvernement. Cet argent est utilisé pour financer des services publics comme les écoles, les routes, et…
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Au pays des promesses on meurt de faim !!
les retraites voteront pour le candidat qui indexera les pensions retraite sur l’inflation,et cela quelque soit le montant de sa pension actuelle